DOSSIER : HORS SERIE Choisir sa classe préparatoire
CLASSEMENTS Pour mettre fin aux diktats
Sortez du rang !
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Anne Jouan, 08 décembre 2004
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Les classements sont aux grandes écoles ce que les guides gastronomiques sont aux grands restaurants. Ceux qui gagnent une étoile collent fièrement un autocollant à l’effigie du guide sur la porte d’entrée et ceux qui en perdent une crient au manque de sérieux, demandant sur quels critères est basée l’évaluation. Réponse : sur les mêmes que lorsqu’ils étaient classés ! Moralité : quand on est bien classé, les classements, c’est bien.
Il y a 15 jours, l’attachée de presse du groupe Essec envoyait aux journalistes un mail intitulé : « L’Essec dans les classements nationaux et internationaux : un bilan favorable ». Dans ce courrier, on peut lire que : « L’Etudiant, la dernière publication « Which MBA » de The Economist Intelligence Unit et le Financial Times positionnent l’Essec parmi les meilleurs MBA et Executive MBA ». L’école explique qu’elle est « classée première grande école de commerce dans le magazine L’Etudiant du 10 novembre 2004, classée pour la première fois dans le Top 100 de la publication annuelle "Which MBA" (The Economist Intelligence Unit) du 6 octobre 2004, classée 38e mondiale des Executive MBA par le Financial Times du 4 novembre 2004 ».
Le paradoxe ne tuant pas, l’Essec note : « Des éléments de reconnaissance qui sont appréciés à leur juste valeur. L’Essec n’a jamais engagé ses réformes en fonction de ces classements dont la méthodologie est d’ailleurs souvent critiquée et les biais en faveur d’institutions anglo-saxonnes évidents. Le travail de fond – pédagogie, recherche, accords internationaux avec les meilleurs MBA mondiaux – prime afin de développer sur le long terme une vision originale de l’enseignement supérieur, en particulier au travers de la réforme Essec MBA de 1999 ».
Les classements rendent les écoles schizophrènes : d’un côté les mères la pudeur qui jurent ne pas manger de ce pain là, de l’autre les communications axées sur la montée en puissance dans un classement par rapport à l’année précédente. Les candidats et leurs parents ne sont pas innocents dans cette course aux classements. Pour les futurs diplômés, le classement de l’école n’est pas innocent dans leur choix. Or, il faut bien l’admettre,quoi de plus aléatoire ? Les critères utilisés pour ces palmarès varient. Il peut s’agir de la « notoriété » de l’école appréciée par les entreprises. Il s’agit souvent d’entreprises parisiennes ou de la périphérie, ce qui fait que les écoles de province sont défavorisées. Ensuite, la taille des promotions n’est pas sans importance car un ancien issu d’une promo de 400 élèves verra passer plus de diplômés de cette école qu’un ancien d’une promo de 120. Or les Mines de Paris ou les Ponts comptent des promos de 120 élèves contre plus de 400 pour Centrale Paris ou Polytechnique. Est-ce à dire que les écoles à promotions réduites sont de moins bon « niveau » sous prétexte qu’elles diplôment moins de jeunes par an ?
N’est-il pas troublant de mettre dans la même balance des écoles généralistes et des écoles spécialisées qui d’ailleurs sont souvent très bonnes dans leur domaine ?
Sans oublier des critères folkloriques comme « l’opinion qu’ont les étudiants des écoles ». Celles qui ont un club voile sont-elles mieux loties que les autres ? Et en quoi est-ce un critère de qualité d’enseignement et de bonne insertion professionnelle ?
Un « bon » classement prendrait notamment en compte la difficulté à intégrer l’école, la diversité des intervenants, la qualité des laboratoires de recherche, le nombre de publications dans des revues reconnues (voir encadré), le temps de recherche d’emploi à la sortie de l’école, la variété des choix de carrière, le salaire à l’embauche, la progression salariale sur 5 et 10 ans.
Quant aux classements de « grande notoriété », ayant par là même des répercussions directes sur l’attractivité d’un établissement, ils sont avant tout anglophones. C’est le cas pour le très attendu classement des meilleures business schools mondiales, réalisé annuellement par le Financial Times. Les critères définis sont américains. Ainsi, ils ne prennent par exemple pas en compte l’internationalisation des établissements. Quand on est Américain, c’est inutile, rien de plus logique ! Ainsi, les très prestigieuses universités américaines occupent massivement et immuablement la tête du classement, alors que leur ouverture internationale est quasi inexistante. Mais tout cela est bien compréhensible : pourquoi s’ouvrir sur le monde alors que le monde vient à vous et que vous êtes, finalement, le monde ? Pour contrebalancer cette vision tronquée, l’établissement d’un classement européen, basé sur des critères européens, serait nécessaire. Si l’on part bien sûr du postulat que ces classements sont incontournables…
ParisTech et le classement du Point
Le 28 septembre dernier, ParisTech, le rassemblement de onze grandes écoles d’ingénieurs parisiennes, adressait une lettre à la rédaction en chef du Point. Gabriel de Nomazy, directeur de l’X et président de ParisTech, notait : « Désireux de poursuivre la collaboration entamée au cours des années précédentes avec votre rédaction en vue de l’amélioration de cette enquête, je me permets d’attirer votre attention sur deux nouvelles questions de l’enquête 2004 qui s’avèrent non pertinentes et auxquelles les écoles que je représente ici ne sauraient répondre :
« Combien de publications comptez-vous parmi les revues d’excellence de la liste ci-jointe publiée par le CNRS (sur les cinq dernières années) ? » La liste fournie est notoirement incomplète en ce qu’elle ne couvre qu’un spectre scientifique étroit qui n’est pas celui de l’ensemble des sections du Comité national du CNRS.
« Pouvez-vous nous fournir la liste des universités étrangères avec lesquelles vous échangez des étudiants et nous préciser celles qui sont labellisées Equis et/ou AACSB ? » Ces labels concernent les écoles de commerce et ne correspondent pas aux critères mis en œuvre par les écoles de ParisTech dans leur politique de partenariat à l’international ».
Enfin, le général a demandé à la rédaction du Point de ne pas tenir compte de ces questions pour établir son classement.