Obtenir un master à 30 ou 40 ans, pourquoi pas ?

"Je ne me voyais pas responsable des ventes jusqu'à 60 ans, se souvient Sophie, 40 ans. En revanche, le côté management du métier m'intéressait beaucoup. J'ai profité du plan de restructuration annoncé par mon entreprise pour postuler au MBA management des ressources humaines de Dauphine." A l'image de Sophie, des dizaines de milliers de cadres et de salariés choisissent chaque année de reprendre leurs études. A mesure que les carrières s'allongent et deviennent moins linéaires, les formations diplômantes sont un moyen de poser de nouveaux jalons dans les cursus professionnels. Elles permettent non seulement d'acquérir de nouvelles compétences, mais aussi de les valoriser par un titre reconnu.

Pour répondre à cette nouvelle demande, les masters, mastères spécialisés et MBA à temps partiel, mieux adaptés à la vie des entreprises, se multiplient. Même les organismes de formation professionnelle s'y mettent. "Ces dernières années, nous avons créé pas moins de 10 masters spécialisés en partenariat avec de grandes écoles", indique Catherine Goutte, directrice du développement du groupe Cegos.

UN ACCÉLÉRATEUR DE CARRIÈRE

La plupart des candidats se situent dans la tranche d'âge 30-45 ans. Pour eux, ces formations correspondent souvent à des points à mi-carrière, qu'ils veuillent changer de métier, de secteur, ou grimper dans la hiérarchie. "Après quelques années d'exercice, certains salariés réalisent qu'ils ne veulent pas faire carrière dans la branche qu'ils avaient initialement choisie", constate Frédéric Henrion, directeur des ressources humaines de la Lyonnaise des eaux. C'est notamment le cas des profils experts – ingénieurs, financiers – très identifiés "technique" et qui cherchent à ajouter de nouvelles cordes à leur arc, afin de viser des postes plus généralistes.

Diplômé de Sciences Po Paris et d'ESCP Europe, Renaud Mahyer n'avait pas besoin d'un nouveau trophée à son palmarès académique. Pourtant, c'est grâce au mastère spécialisé de Supélec sur les nouveaux marchés de l'énergie ("energy manager") qu'il a pu troquer sa casquette de contrôleur de gestion chez Renault contre un véritable poste de manager d'équipe chez GDF-Suez, en prise plus directe avec la vie de l'entreprise.

BOOSTER SON CV

Autre cas de figure: les profils universitaires qui se retrouvent en concurrence avec les diplômés des grandes écoles et prennent conscience qu'ils n'ont pas avec les mêmes atouts en main. Titulaire d'un DEA (diplôme d'études approfondies) d'histoire, Arnaud, 37 ans, en avait assez de végéter dans la maison d'édition qui l'avait embauché une dizaine d'années auparavant. A l'occasion d'un plan social, il a négocié son départ et entamé un mastère spécialisé en management de l'innovation à l'Ecole centrale de Paris. Deux ans après sa sortie, cet ancien chef de projet se retrouve à la tête d'une division de 200 personnes au sein d'un grand groupe de communication, et a multiplié son salaire par 2,5.

Pour d'autres encore, le diplôme est une revanche personnelle… et un moyen de faire sauter les derniers verrous dans leur ascension. "Au-delà de la quarantaine, on a le cas de personnes qui sont arrivées à des postes à responsabilité par promotion interne. Le master est pour eux une consécration, une manière de se faire reconnaître par leurs pairs", explique Catherine Goutte. "Quand on est autodidacte, faire reconnaître ses compétences par un diplôme évite de se retrouver fragilisé sur le marché du travail en cas d'accident dans l'entreprise. C'est une véritable arme antichômage", insiste Sabine Faist, conseillère au Fongecif d'Ile-de-France, qui finance nombre de ces formations.

L'EFFET RÉSEAU

Élargir son réseau professionnel est un autre bénéfice de la démarche. "Une formation de ce type, c'est une mine de contacts professionnels, confirme Jérôme Dézèque, diplômé du MBA management des ressources humaines de Dauphine.Tous mes camarades de promotion avaient au minimum cinq ans d'expérience et des jobs à responsabilités – le prérequis pour être sélectionné." Etre inscrit dans l'annuaire des anciens de son école ouvre également des portes… même si certains n'attendent pas aussi longtemps avant d'être sollicités. "J'ai été contacté par des chasseurs de tête avant même d'avoir fini ma formation", s'étonne encore Arnaud, qui, de cette façon, a enchaîné deux postes à responsabilités en deux ans.

"On constate un certain turnover après ce type de formation", confirme Etienne Menut, directeur des ressources humaines de Sierra Wireless, une société canadienne de télécommunications. À tel point que certaines entreprises font signer des clauses de "dédit formation". Le salarié s'engage alors à rester un certain temps dans l'entreprise après sa formation ou à en rembourser le coût. "Si on a investi financièrement dans la formation, on demande au salarié de s'engager à rester d'un à trois ans dans l'entreprise", insiste Etienne Menut.

Source: http://www.lemonde.fr
11-05-2011

 

 

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