Le MBA, un outil de gestion de carrière
Pour répondre aux attentes de leurs participants, les MBA mettent l’accent sur le projet de carrière, mais aussi sur le développement personnel, le leadership, la créativité… Résultat, le MBA apparaît de plus en plus comme un cursus « différent », qui permet de « faire le point » et de relancer sa trajectoire professionnelle.
« Une baguette magique ». Pour Catherine Marionneau, conseillère au service carrières d’Audencia, c’est ainsi que les participants considèrent souvent le MBA. Ce qu’ils en attendent ? Un meilleur job, attrayant et mieux payé, une mise en relation avec des entreprises, un réseau… Autant de souhaits que les services carrières des MBA feront tout pour satisfaire.
Mais ce que les futurs diplômés n’imaginent pas forcément, c’est que ces mêmes services vont également les inciter à se remettre en question. Pour y parvenir, ils n’hésiteront pas « à les faire sortir de leur zone de confort », comme le décrit Jacques Tournut, directeur des MBA et mastères à l’ESC Toulouse. Objectif : que les participants « se construisent un projet professionnel le plus réaliste possible », pour « gagner en crédibilité devant l’employeur », indique Catherine Marionneau. Pour Jacques Tournut, cette évolution correspond aussi aux nouvelles attentes des recruteurs. « Aujourd’hui, le savoir est accessible aisément, ce n’est plus un problème, analyse-t-il. Ce que les employeurs recherchent, c’est une personnalité, quelqu’un qui va savoir se mouvoir dans l’entreprise et faciliter le travail des équipes. »
Pour pousser ces « hauts potentiels » de trente ou quarante ans à faire un peu d’introspection, à chacun sa méthode. Depuis 2005, Audencia a adapté à leur intention une démarche qui avait été mise au point pour ses élèves juniors. « Une sorte de minibilan de compétences », résume Catherine Marionneau, qui, à travers des ateliers de groupe et des entretiens individuels, les fait réfléchir à leurs envies, leurs réussites et leurs échecs. Pour cela, une consultante externe a formé les 3 ou 4 collaborateurs que compte le service carrières, qui fait également appel à des coachs professionnels.
Coaching et simulations
De son côté, Jacques Tournut mise très fortement sur la logique de groupe, le travail d’équipe et la confrontation des cultures. « Nous avons un coach par programme, qui traite le recrutement, s’occupe du "team building" en début d’année et voit ensuite les participants individuellement pour les faire travailler sur leur projet , note-t-il. Les participants peuvent bien avoir le diplôme ; mais si à la fin de leur parcours, ils n’ont pas de l’humanité, de l’humilité, de l’empathie, de l’écoute, s’ils ne savent pas utiliser leur intuition pour détecter un problème dans leur équipe, c’est raté », estime Sarah Kartalia, membre de l’équipe de coachs. Avec la crise, les services carrières ont encore davantage le vent en poupe. Logique : des étudiants qui ont investi de 25.000 à plus de 50.000 euros dans leur formation veulent des résultats. A HEC, l’accompagnement des participants, tant psychologique que pour la carrière, occupe désormais une place croissante : la partie « soft », dédiée à la réflexion sur le projet professionnel, à l’« organisational behaviour », au travail sur le leadership, représente un tiers environ du programme.
Redonner le moral
A l’Insead, le service carrières s’est mis en quatre pour redonner le moral à ses troupes dès la disparition de Lehman Brothers, à l’automne 2008. Il a, par exemple, écrit aux diplômés des promotions sorties en 2001 et 2002, les dernières à avoir subi une crise de l’emploi, pour leur demander de raconter leur parcours. « Nous avons rassemblé les 250 contributions que nous avons reçues dans un guide de 35 pages », explique Sandra Schwarzer, la directrice du service. Une façon de faire comprendre que « l’on s’enrichit plus de ses échecs que de ses succès », indique Daniel Fulda, coach professionnel et président des anciens de l’école. Preuve de son importance, le service a vu ses effectifs augmenter d’un tiers en deux ans, quatre postes ayant été créés en lien direct avec la crise. Fort désormais de 25 personnes, il organise chaque année une multitude d’ateliers, de simulations d’entretiens, de rencontres avec des professionnels… Et il compte sur une équipe de 11 coachs professionnels pour soutenir ses promotions de près d’un millier d’étudiants – en additionnant les deux MBA de l’école. « Pour un jeune qui entre à l’Insead en MBA, les objectifs de pouvoir, de reconnaissance et d’argent sont très forts, observe Daniel Fulda. Nous allons néanmoins leur montrer les dangers d’une implication trop exclusivement focalisée sur ces objectifs. » Moins « magique », mais plus « introspectif », le MBA ?
Par: VALÉRIE NOËL
Source: http://www.lesechos.fr/
30/03/2010