Un peu partout dans le monde, des esprits novateurs travaillent à réinventent notre monde. Elon Musk, surnommé le nouveau Steve Jobs, est sur deux fronts à la fois : les fusées et la voiture de sport électrique. Elon Musk voit le jour en 1971 à Pretoria, en Afrique du Sud.
Le « Game of Thrones » de la Silicon Valley oppose quatre empires aux ambitions tentaculaires : Facebook, Apple, Amazon et Google. Leurs quatre dirigeants s’affrontent sur tous les terrains, hardware, software, smartphones, moteurs de recherche, ventes d’applications, drones, réalité virtuelle. Ce qui est en jeu, c’est le trône de fer laissé à l’abandon suite à la mort prématurée de Steve Jobs.
Son héritier le plus probant se tient pourtant à l’écart de ces batailles de titans.
Elon Musk n’a pourtant pas choisi des défis moins ambitieux : avec Tesla Motors, il commence à révolutionner le monde de l’automobile au grand dam de General Motors, Ford ou autre Mercedes. Et avec son autre entreprise en croissance explosive, SpaceX, il a volé le feu sacré de la conquête spatiale aux géants Boeing et Lockheed pour devenir le premier partenaire de la NASA.
Il arrive communément que la presse américaine compare Elon Musk à Thomas Edison, le père de la révolution industrielle. C’est là une différence majeure avec Steve Jobs : si les iPhones et iPads sont « designed in California » mais fabriqués en Chine, Musk finance à coup de milliards de dollars la construction d’usines en Californie ou au Texas.
Lors d’un passage dans l’émission satirique « The Colbert Report », une sorte de « Petit Journal de Yann Barthes » américain, on a découvert Elon la personne publique : geste mesuré, verbe assuré, un visage qui rayonne d’intelligence et de confiance en soi, pommettes saillantes qui pourraient devenir sa marque de fabrique si la célébrité le rattrape comme elle a rattrapé Steve Jobs. Elon exhale une énergie aussi précise que celle d’un laser. Ses collaborateurs parlent d’un individu sans limite, sans grand sens du contact social, capable d’aligner des semaines de cent heures de travail pour connaître dans le moindre détail les plus minuscules aspects des technologies de ses sociétés.
Zip-Zap : la fortune expresse d’un enfant de Prétoria.
Elon Musk voit le jour en 1971 à Pretoria, en Afrique du Sud. Difficile de distinguer dans sa biographie une influence particulière liée à sa naissance dans le pays de l’Apartheid. Il grandit dans une famille blanche plutôt aisée et s’intéresse très vite aux livres et aux sciences plutôt qu’à l’environnement qui l’entoure. Sa mère a quitté le domicile familial et comme beaucoup d’enfants de divorcés, il fait de son ordinateur son confident le plus proche.
On le retrouve étudiant, au Canada d’abord puis aux Etats-Unis. Pas de blues de l’immigrant chez Elon Musk :
« Je suis venu aux Etats-Unis car c’est le pays où les gens comme moi se retrouvent pour faire ce dont ils rêvent. »
Elon Musk est admis à Stanford mais décide de renoncer à ses études supérieures pour monter sa première entreprise, Zip2 à l’aube de l’explosion de l’Internet. Le concept de Zip2 est simple : les fournisseurs de contenus, les journaux et les magazines en particulier, vont devoir créer des sites Web pour exploiter leurs contenus sous forme numérique. Elon ajoute : « Les journaux appartenaient à de grandes entreprises, et il me semblait qu’ils deviendraient des clients solides et solvables pour nous ».
Elon programme, vit au bureau, dort sur un futon collé contre son bureau mais les clients affluent. Il faut faire face à la croissance. Elon propose à son frère Kimbal et à leur mère de le rejoindre pour développer l’entreprise. Bientôt le prestigieux New York Times leur confie une partie de ses éditions numériques. Dell qui cherche à se diversifier dans le service Internet décide de racheter Zip2. L’affaire est rapidement conclue pour trois cent millions de dollars. Elon a vingt huit ans.
Il se remet à la tâche avec un nouveau projet dénommé X.Com. Il s’agit de créer une suite de services bancaires dématérialisés accessibles par un site Web. Il tourne autour de l’idée de mettre au point un système de paiement par email. Un autre garçon travaille sur un sujet similaire et sur un programme qui s’appelle déjà PayPal. X.Com fusionne avec PayPal. L’entreprise se développe rapidement comme nous le narrons dans le chapitre consacré à Peter Thiel, alors associé d’Elon Musk. Début 2002, PayPal rentre en Bourse, fin 2002, elle est racheté par eBay pour 1,3 Milliards de dollars.
SpaceX : dans vingt ans sur la planète Mars.
Si certains, comme Ray Kurzweil, se noient dans la science fiction, Elon Musk y puise une inspiration qui débouche systématiquement sur des applications pratiques. Dès avant la vente de PayPal, il a commencé à plancher sur un nouveau projet : monter une entreprise industrielle qui puisse être un concurrent privé et crédible de la NASA, la célèbre agence spatiale américaine qui a fait marché, en juillet 1969, un homme sur la Lune.
Comme avec Zip2 ou avec PayPal, il analyse l’opportunité de manière duale : coté créatif, il rêve de concrétiser son rêve de voyage interplanétaire, coté rationnel, alors que la demande pour des lanceurs de satellites ne faiblit pas, la NASA est une administration à la dérive et le programme spatial américain est devenu un squelette. En février 2003, quelques mois après le dépôt des statuts de SpaceX, son entreprise d’aérospatiale, Elon assiste alors qu’il regarde la télévision comme des millions d’américains, à la vaporisation de la navette spatiale Columbia au dessus du ciel du Texas. Cet événement sonne le glas du dernier programme opérationnel de la NASA. Les années qui suivent sont mortifères pour l’Agence publique : commission d’enquête du Congrès, établissement de nouvelles règles de sécurité paralysantes, réduction en cascade des budgets de recherche.
Physicien de formation, codeur autodidacte, Elon Musk ne connaît rien à la manière dont on construit les fusées. Toutefois, l’intensité de la passion qui l’habite lui procure deux atouts majeurs : d’abord il absorbe à une vitesse époustouflante les connaissances qui lui font défaut et ensuite, il insuffle un sens de l’aventure qui lui permet de recruter les meilleurs du secteur.
Le programme spatial américain a déjà largement été privatisé lorsque Musk investit le secteur. Boeing et Lockheed-Martin, les deux constructeurs d’avion,s de ligne pour l’un et de combat pour l’autre, se sont assurés une répartition des contrats de lancement de satellites, militaires en particulier.
Le client de Boeing et de Lockheed est le Pentagone qui n’est pas très regardant à la dépense. Il n’est pas envisagable qu’il fasse appel aux Russes pour lancer ses satellites espions. Space X entend changer le marché en proposant des fusées low cost.
Elon a une première idée baroque : débarquer à Moscou pour négocier le rachat d’une poignée d’ICBM, les missiles intercontinentaux porteurs de bombes atomiques que les soviétiques ont produit en masse avant que la Fédération de Russie les mettent au rencard. La solution n’est pas très bien accueillie et Elon doit abandonner ce projet. Il décide que si SpaceX doit prospérer, l’entreprise doit maîtriser sa propre technologie et construire ses propres fusées de A jusque Z.
Elon conçoit alors la première pièce du puzzle : un moteur qui s’appellera le Merlin. Il explique :
« Je voulais construire le diesel des moteurs de fusées, le contraire d’une Ferrari. »
Il peut sembler contre-intuitif de chercher à faire moins performant mais meilleur marché dans un secteur si proche de l’industrie de la défense. C’est pourtant typique de l’esprit de la Silicon Valley : même une idée innovante doit pouvoir être créée et testée en bricolant à partir de briques déjà existantes.
Le moteur Merlin est fabriqué et les tests commencent. Elon présente l’engin aux experts de la NASA. Il doit obtenir leur accord pour pouvoir accéder aux centres d’essai d’où commencer à lancer ses fusées. Les experts sont intrigués : Elon a éliminé tout le superflu de l’ingénierie des moteurs pour se concentrer sur les pièces essentielles. Mieux encore : chacune peut être remplacée en un tour de main si un incident se produit. SpaceX s’est concentré sur la compétitivité de son offre, pas sur l’innovation technique.
Le moteur est finalement approuvé et la NASA accorde un crédit de 100 millions de dollars pour produire les fusées qui serviront aux essais en vol.
Elon raconte : « Il y a toujours deux moments dans la vie d’une start up : le début où tout se passe d’abord très bien et on a l’impression que l’on va réussir très vite.
Puis les problèmes commencent, les questions qui n’avaient pas été anticipées et on rentre dans la période critique. Il y a alors la période entre l’année 2 et l’année 5 où on souffre vraiment ».
La traversée du Désert survient en effet. En 2007, trois essais de mise en orbite de la première fusée Falcon 1 échouent. Elon ne sombre aucunement dans l’auto- indulgence :
Lorsque la crise financière s’invite dans le décor, Elon a presque consommé jusqu’à son dernier sou car au même moment il a considérablement investi dans une autre entreprise à risque, un fabricant d’automobile électrique, Tesla Motors.
Le quatrième essai sera le dernier. S’il échoue, SpaceX sera placé en faillite et Elon Musk sera ruiné…
Tesla Motors : des voitures de sport électriques.
Juste après avoir revendu PayPal, Musk a commencé à s’intéresser aux automobiles électriques. Si les hybrides de Toyota connaissent un grand succès aux USA, toutes les tentatives de faire décoller une voiture entièrement électrique ont échoué. D’ailleurs, toutes les tentatives de créer un nouveau constructeur automobile face aux trois géants de Détroit, General Motors, Ford et Chrysler ont échoué depuis 1950.
Comme pour SpaceX, Elon a voulu prendre le problème à l’envers. Le segment de marché qui rapporte le plus de marge est celui des voitures de sport. Les voitures électriques ont une image négative, celle de véhicules lents à faible autonomie. Dans l’esprit du grand public, le souvenir qui persiste est celui du modèle Volt de Chevrolet, une sorte de ‘blob’ qui ne pouvait séduire qu’une poignée d’écolos de banlieue, autant dire une toute petite minorité aux Etats Unis.
Comme pour les fusées, Elon pense d’abord motorisation et avec une petite équipe met au point un moteur dont les performances sont compatibles avec l’idée d’une voiture de sport. Il fait le choix d’un moteur à courant alternatif plutôt que continu. Ce choix a été l’enjeu d’une guerre longue et difficile entre Nicola Tesla, l’inventeur du courant alternatif et Thomas Edison qui défendait l’idée du courant continu. Les voitures seront donc baptisées Tesla, même si Elon a une affection plus marquée pour Edison dont les inventions ont eu un plus grand succès commercial.
Pour la carrosserie, Tesla Motors passe un accord avec le fabricant britannique Lotus. Reste la pièce la plus importante d’une voiture électrique : les batteries. Elon décide d’équiper ses véhicules de batteries Lithium Ion, les mêmes que celles des ordinateurs portables.
Robert Lutz, l’ex patron de General Motors peste encore dans les colonnes du New Yorker :
« Tous nos génies, ici chez General Motors, nous avaient affirmés que la technologie Lithium-Ion n’aurait de sens pour des voitures que dans une dizaine d’années, Toyota partageait notre analyse.
Et boum, voilà Tesla. Alors je leur ai dit : ‘Comment se fait-il qu’une minuscule start-up californienne, dirigée par des types qui ne connaissent rien du business des voitures puisse faire ça et nous pas ?’ C’était la barre à mine qui pouvait débloquer le passage. »
Extrait de “Les rebelles du numériques” de Daniel Ichbiah et Jean-Martial Lefranc, aux Editions First Interactive, 2014. Pour acheter ce livre, cliquez ici.
Source: http://www.atlantico.fr/
28/12/2014