Il est plus facile à un jeune homme de réussir ses études qu’à une jeune fille de mettre les pieds à l’école. Quel que soit le pays, ceci est une réalité !
Deux problèmes fondamentaux se heurtent à la scolarisation de la jeune fille : le poids de la tradition et les problèmes financiers. Pour de nombreux parents, les hommes sont un “investissement” plus sûr.
Pour changer la donne, la Côte d’Ivoire étudie de nombreux mécanismes pour tenter de ramener un nombre important de jeunes filles sur les bancs des écoles. Et l’une des alternatives qui est fortement à l’étude c’est bien entendu la prise en charge complète de la jeune fille. Il faut déjà commencer par des problèmes existentiels de base : un logement, de la nourriture et un cadre pour pouvoir échapper aux tentations et vices. L’endroit qui rassemble toutes ces conditions est bien le foyer de jeunes filles.
Pendant longtemps, le Président Félix Houphouët Boigny (premier président ivoirien) a basé sa politique de scolarisation de la jeune fille sur le système des foyers féminins. Mme Maryse Kouamé qui était alors une jeune élève s’en souvient. « Il n’y avait pas de place pour les loisirs inutiles. Chaque foyer avait des surveillantes rigoureuses et elles nous imposaient un rythme de vie à la limite militaire qui a porté des résultats positifs ». Dans les foyers, les sorties étaient contrôlées et les jeunes filles soumises à une discipline. Dans cet univers fait d’étude et de discipline, les filles avaient d’excellents résultats scolaires. On déplorait moins de grossesses en milieu scolaire et les cas d’abandon étaient rares. Au-delà du côté éducatif, les foyers féminins étaient des espaces de rencontre pour le développement culturel de la jeune fille. Mme Koné Aliman, mère de famille se rappelle aisément de cette période où elle s’initiait « aux jeux de société, à la pratique du théâtre, la maîtrise de l’art oratoire et les jeux de culture général ». Hélas des foyers féminins il ne reste que des souvenirs ! Les crises successives que la Côte d’Ivoire a connues ont poussé les autorités à abandonner les programmes de foyers féminins. Aujourd’hui en Côte d’Ivoire, les jeunes filles sont livrées à elles mêmes, obligées de partager leur espace de vie avec des jeunes garçons. Dans de petites chambres, elles vivent à 4 ou 5 (filles et garçons) avec tous les risques que cela sous-entend. Les viols, les grossesses à risque, des études bâclées faute de surveillance et de discipline, des abandons scolaires importants sont aussi les résultats de la disparition des foyers féminins.
Dans une logique de maintien de la jeune fille sur les bancs de l’école, le retour de la politique des foyers féminins est plus qu’un impératif. Elle permettra non seulement à la jeune fille de trouver un cadre propice à son épanouissement mais aussi permettra de créer et maintenir de nouveaux emplois. « Il faut noter que la gestion d’un foyer féminin est une occasion de valoriser les fonctions de l’enseignement et de la prise en charge scolaire. La formation pour Intendant de foyers scolaires a pratiquement disparu, celles d’Educateur-Encadreur et Surveillante Générale également. Il faut réactiver le cursus de formation de ces filières pour offrir de l’emploi aux femmes qui demain auront en charge la gestion de ces foyers féminins » nous explique N’goran Alphonse cadre de l’enseignement à la retraite. Au-delà des emplois dit formels, il faut aussi ajouter le personnel d’entretien des foyers féminins. Les cuisinières, les blanchisseuses et les techniciennes de surface pourront bénéficier de contrats susceptibles de les sortir des difficultés quotidiennes. Le retour de la politique des foyers féminins pourra non seulement aider à la scolarisation des jeunes filles mais aussi être un point de création d’activités génératrices de revenus pour plusieurs autres femmes.
SUY Kahofi pour ExcelAfrica
21 avril 2013