ORIENTATION – Le devenir des futurs bacheliers

Mars est le mois de préinscription pour la rentrée prochaine des quelque 700.000 candidats au baccalauréat. C'est donc le mois où il est plus nécessaire que jamais de ne pas prendre pour argent comptant les chiffres les plus délirants qui circulent sur les taux de succès en premier cycle de l'enseignement supérieur, particulièrement en année d'élections.

Toutes séries confondues, il est probable qu'environ 85 % des 700.000 candidats réussiront leur bac et que 410.000 nouveaux bacheliers chercheront alors à poursuivre des études dans l'enseignement supérieur dès la rentrée d'octobre. Moins de la moitié d'entre eux (44 %) s'inscriront en première année de licence universitaire, premier cycle d'une durée de trois années depuis la réforme qui a supprimé le DEUG qui ne durait que deux ans ; les autres (56 %) s'inscriront dans une filière sélective, en particulier les classes préparatoires d'une durée de deux années, les instituts universitaires de technologie (IUT) ou les sections de techniciens supérieurs (STS) pour des études qui devraient durer deux années, les écoles pour une durée très variable. Un premier mythe tombe, le refus de la sélection ! La poursuite d'études dans le supérieur est le lot de pratiquement tous les bacheliers généraux, de 3 bacheliers technologiques sur 4 et 1 bachelier professionnel sur 4.

Quels pourraient être leurs résultats si les tendances de ces dernières années se poursuivent ? Sur 100 étudiants inscrits en première année de licence plus de la moitié, 53, passeront en deuxième année, faisant tomber un deuxième mythe sur l'échec. Parmi les 47 autres, 24 redoubleront en première année, 9 s'inscriront en IUT ou STS conformément le plus souvent au souhait qu'ils avaient exprimés au moment du bac, 8 iront suivre d'autres formations ; seulement 6 sortiront de l'enseignement supérieur. L'année d'après, 43 s'inscriront en troisième année de licence, 24 redoubleront, 2 de plus iront en IUT ou STS et 5 de plus quitteront l'enseignement supérieur. In fine, quatre ans après avoir obtenu leur bac, 38 auront obtenu leur licence en trois ans, 53 en trois ou quatre ans et 14, on serait tenté de dire seulement 14, auront quitté l'enseignement supérieur, sans plus de diplôme que le bac qu'ils avaient en y entrant. On est loin des 50 % d'échec que certains annoncent !

D'autre part, il faut rapprocher ce taux d'échec de celui des inscrits en BTS qui quittent l'enseignement supérieur sans diplôme, 27 %, quoiqu'ayant été sélectionnés à l'entrée. En regardant plus le détail, il apparaît que si 86 % des bacheliers généraux et 69 % des bacheliers technologiques réussissent leur STS en deux ou trois ans, moins de la moitié des bacheliers professionnels sont dans ce cas et finalement 52 % quittent l'enseignement supérieur sans nouveau diplôme. Pour ceux qu'on laisse s'égarer dans une licence, les résultats sont hélas encore pires. Il ne faut pas s'étonner de cela puisque les bacs professionnels, créés en 1985, n'ont pas été conçus pour donner lieu à poursuite d'études supérieures dans les voies traditionnelles mais pour qu'ils attestent de l'aptitude de leur titulaire « à exercer une activité professionnelle hautement qualifiée » dans une centaine de spécialités qui sont très appréciées sur le marché du travail à condition de s'y présenter immédiatement après le bac.

Il est très intéressant de remarquer que les meilleurs taux de succès sont obtenus par les bacheliers généraux qui étaient « à l'heure », c'est-à-dire âgés de 18 ans au moment du bac : 51 % obtiennent leur licence en trois ans et 68 % en trois ou quatre ans, alors que les bacheliers généraux « en retard » ne sont que 30 % à obtenir leur licence en trois ans et 45 % en trois ou quatre ans. Quant aux bacheliers technologiques, ils ne sont que 10 % à réussir leur licence en trois ans et 20 % en trois ou quatre ans.

Les mentions assez bien, bien et très bien délivrées aux bacheliers généraux sont beaucoup plus nombreuses qu'à l'époque de leurs parents : 22 % de mentions bien et très bien, 28 % de mention assez bien. Sans trop de surprise, on constate que, comme le fait d'avoir passé le bac « à l'heure », la mention au bac est un indicateur avancé des résultats dans l'enseignement supérieur. Les bacheliers ont un comportement plutôt rationnel : les bacheliers titulaires d'une mention bien ou très bien s'inscrivent plus qu'il y a une douzaine d'années en université, très attirés en particulier par la médecine et la pharmacie, et moins en classes préparatoires. A l'opposé, les bacheliers titulaires d'une simple mention passable s'inscrivent moins en université et beaucoup plus dans les écoles dont l'accès ne se fait pas par une classe préparatoire.

Daniel Vitry est professeur à Paris-II.

01/03/2012

http://www.lesechos.fr

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