Faute d’une représentation diplomatique à Tripoli, ces derniers vivent dans la peur dans ce pays en proie à la violence, accusés d’être des «mercenaires» de Kadhafi.
Les évacuations des ressortissants étrangers continuent en Libye, au 14ème jour d’une révolte populaire visant à faire tomber le régime de Mouammar Kadhafi. L’Unions européenne (Ue), les Etats-Unis ou encore la Chine ont mis en place un programme pour sortir leurs nationaux de l’enfer libyen. Dimanche, des immigrés soudanais et maliens ont réussi à sortir de Libye après plusieurs heures d’attente au poste de frontière de Ras Jedir, indique Rfi. Contrairement à ces derniers, de milliers autres Africains, notamment ceux du sud du Sahara, sont abandonnés à leur sort, sans aucune aide de leur gouvernement respectif. Parmi ceux-ci, des Camerounais. Combien sont-ils ?
Des dispositions sont-elles prises ou ont-elles été prises par le gouvernement camerounais pour leur évacuation vers une zone sécurisée ? Difficile de répondre à cette question, le ministère des Relations extérieures (Minrex) n’étant apparemment pas disposé à communiquer là-dessus. En effet, rendue au Minrex hier, le reporter de Mutations n’a pu obtenir les informations souhaitées malgré toutes les démarches entreprises. «Allez voir le chef de service, porte 716», lance le secrétaire du directeur des affaires Afrique, affirmant que «le directeur est occupé pour le moment et ne peut pas vous parlez». A la porte 716, le responsable en question se refuse à tout commentaire «sans l’aval de sa hiérarchie.» A la cellule de communication où le responsable s’est engagé à communiquer lesdites informations au reporter d’ici 15h, aucun signe de vie le moment venu.
«Aventuriers»
Même nos relances sont restées vaines, son téléphone sonnant interminablement dans le vide. Toutefois, selon une source généralement bien informée au Minrex, il est difficile d’estimer le nombre de Camerounais vivant en Libye, car «le Cameroun est le seul pays en Afrique qui n’a ni consulat ni ambassade» dans ce pays arabe. Par conséquent, poursuit la même source, le gouvernement ne dispose pas d’un «fichier fiable», contrairement en Tunisie où les ressortissants camerounais, en majorité des étudiants et des travailleurs, étaient officiellement enregistrés à l’ambassade du Cameroun à Tunis. Selon notre source, l’absence d’une représentation diplomatique en Libye ne justifie pas à elle seule la difficulté à recenser la communauté camerounaise en Libye. «Beaucoup sont des aventuriers qui comptaient gagner l’autre côté (l’Europe, Ndlr), et qui ont dû échouer en Libye en attendant de repartir», avance notre source.
Dans ces conditions, difficile donc d’entreprendre quoi que ce soit, apprend-on. Pourtant, lors de sa toute première visite en Libye en novembre dernier lors du troisième sommet Union européenne-Afrique, le chef de l’Etat camerounais, Paul Biya, avait reconnu qu’il y avait une forte communauté camerounaise en Libye. Des Camerounais qui sont aujourd’hui abandonnés à leur sort, et qui vivent dans le désarroi complet.
Ce d’autant plus que la population libyenne les associe aux «mercenaires» engagés par le régime Kadhafi pour réprimer, dans le sang, le mouvement de contestation populaire. «Nous travaillons en ce moment pour voir dans quelle mesure nous pouvons ouvrir une représentations consulaire ou diplomatique en Libye», confie notre source. On évalue à plus de 100.000, le nombre d’étrangers vivant en Libye qui ont déjà quitté le pays depuis le début de la révolte.
Alors que le mouvement ne semble pas faiblir, les contestataires ayant créé dimanche, un «Conseil national» de transition, le Guide libyen Mouammar Kadhafi reste sourd et indifférent à la rue et à la pression internationale. Après l’Onu, l’Ue a pris hier, des sanctions contre le colonel Kadhafi et 25 de ses proches ; des sanctions qui vont du gel des avoirs jusqu’à l’interdiction de visa en Europe, en passant par l’embargo sur la vente des armes.
Patricia Ngo Ngouem
Source: http://www.quotidienmutations.info
01/03/2011