Université de Douala : Les associations ethniques attirent les étudiants

Université de Douala : Les associations ethniques attirent les étudiants

C’est le refuge de ceux qui viennent d’ailleurs et qui veulent rester en contact avec leur culture.

Sandrine Tonlio (Stagiaire)
Source: http://www.quotidienmutations.info
21/7/08

Assis sur une scène de spectacle construite au lieu dit "Mont des oliviers" à l’Université de Douala, calepins à main, les membres du club Aedele (Association estudiantine de la Lékié) sont imperturbables. "Nous nous retrouvons ici tous les samedis pour discuter entre frères de la Lékié", confie une adhérente. Ce club, qui existe depuis près de 60 ans, a pour objectif premier de promouvoir la culture de cette localité de la province du Centre. "Ensuite, nous développons l’esprit d’entraide et de partage au sein du groupement", explique Jeanne Ninon Ada, chargée de la communication de l’association. La Jescoba (Jeunesse estudiantine et scolaire Bafou), elle, ne semble pas moins active au sein du campus. Elle a pour buts, entre autres, de réunir la jeunesse Bafou, arrondissement de Dschang à l’Ouest cameroun. L’association promeut aussi la culture yemba.

La dizaine d’associations ethniques que compte l’Université de Douala ont, en effet, pour rôle principal la promotion de la culture de chaque département représenté (l’Océan, le Wouri, la Sanaga Maritime, le Moungo, etc.). Certaines organisations mettent l’accent sur "le rassemblement des étudiants ressortissants et la recherche du partenariat avec des élites du village", soutient Pochar Tientcheu, commissaire aux comptes de l’Asjehn (Association des jeunes étudiants du Haut-Nkam). Ce club a été constitué en 2003 par les étudiants de ce département. Le "grand Nord" est aussi représenté. Son association se nomme Kawtal (association des étudiants du grand nord).

Selon les dirigeants de la Jescoba, pour être membre de l’association, il faut simplement être un étudiant ressortissant de Bafou. "C’est une condition sine qua non, parce qu’au cours de nos réunions, nous parlons uniquement la langue yemba. Un étranger ne peut donc pas comprendre ce que nous voulons transmettre. Notre objectif c’est de permettre à nos frères de connaître la grande famille Bafou. Les origines sont donc importantes", explique Michael, un adhérent. Dans ces regroupements ethniques, les frais d’adhésion sont néanmoins exigibles.

Ils varient entre 1.000 francs et 2.000 francs Cfa. "A la Jescoba, nous exigeons une somme de 2.000 francs Cfa pour tout nouvel adhérent. Cet argent est utilisé pour établir les badges et amortir certaines dépenses du club", justifie le chargé des projets informatiques. D’autres organisations, par contre, sont ouvertes à tous les étudiants. "Nous voulons faire connaître notre culture à tous les étudiants et changer pour nous améliorer", argue-t-on.
Ces regroupements ethniques développent des activités tout au long de l’année académique. Ils organisent notamment, dans le cadre éducatif, des séances d’échange de connaissances. Pendant ces entretiens, les aînés académiques donnent, par exemple, des éclairages sur les différentes unités de valeur déjà dispensées par les enseignants. D’autres élaborent des projets pour aider les élèves du secondaire à travers des tests de niveau. Pour renforcer cette action, ils organisent des visites d’entreprises et des conférences.

Intérêts
"Nous invitons souvent des professionnels qui viennent entretenir les membres de l’association sur un sujet précis", confie Michael. Des excursions pour des découvertes et des recherches sont aussi planifiées. Les dirigeants élaborent un planning pour rendre visite à toutes les élites de la tribu à laquelle ils appartiennent. Ces rencontres permettent aux adhérents de connaître ceux qui peuvent leur venir en aide, en cas de besoin. Ils organisent aussi des descentes dans les différentes familles des membres, et planifient des rencontres avec les aînés qui sont passés par le club. Des activités sportives ne sont pas en reste. Ces associations claniques sont de plus en plus sollicitées par les étudiants nouvellement inscrits à l’Université de Douala. Certains prétendent y trouver leur compte.

"Je viens de Yaoundé. A mon arrivée dans cette ville, j’ai été en contact avec le peuple bassa, qui constitue mon voisinage. J’ai donc éprouvé le désir d’être en contact avec mes racines. Je suis aussi là, parce que je veux mieux m’exprimer en langue éton que je ne maîtrise pas bien car mes parents n’en parlent presque jamais. Les deux ans que j’ai passés au club m’ont beaucoup apportée sur le plan de la culture ; et le poste de responsabilité que j’occupe m’a permis de rencontrer les personnalités que je n’aurai jamais imaginé rencontrer un jour", confie Jeanne Ninon Ada.
Très souvent, certains étudiants se servent de ces représentations ethniques pour trouver des stages de vacances. "Nous proposons aux élites une liste de tous les membres qui sollicitent un stage de vacance. En fin d’année académique, nous venons tout simplement récupérer les dossiers et proposer les entreprises ciblées aux différents membres", confie Michael.

"Je suis satisfait sur le plan de la vie associative, parce c’est important de vivre en communauté, de donner son point de vue, de prendre la parole devant une assemblée…", explique un membre de la Jescoba. Pour certains membres de l’Asjehn, la vie associative est un apport pour les relations humaines, pour l’ouverture de l’esprit, les travaux de recherche, voire les récompenses. Toutefois, ces associations ethniques ne sont pas toutes reconnues au sein de l’Université de Douala, ce qui limite leur action. "Nous fonctionnons clandestinement parce qu’en début d’année académique, la liste des associations autorisées est affichée par l’administration", soutient un dirigeant de club. D’autres pointent du doigt des aînés, qui ne veulent pas que les jeunes assurent la relève. C’est le cas, par exemple, du club du département du Haut-Nkam, qui a dû mettre un terme à ses activités cette année. "Nous avons eu un problème de gestion dans notre association. Les aînés ne veulent pas nous faire confiance. Ils abusent de leur position", confie Pochar Tientcheu.

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