Situation des malades mentaux au Sénégal : L’insertion post-cure pose problème
Un accroissement rapide des malades mentaux est observé dans les rues de Dakar. Ce phénomène est passé à une vitesse de croisière au point qu’on ne peut plus effectuer quelques mètres sans croiser un malade mental dans certaines rues de la capitale. Ces malades menacent la population, comme c’est le cas au marché central de Rufisque où ils sont à la quête de nourriture ou d’argent. Pire, ces malades, à la limite agressifs, menacent les passants dans les rues. Pourtant, beaucoup d’entre eux sont passés dans les centres de santé. Mais leur prise en charge après la guérison fait défaut.
Les malades mentaux constituent un véritable danger au Sénégal. Surtout quand on sait que bon nombre d’entre eux tiennent souvent dans leur main des armes : pierres, barres de fer, bâtons, etc. Ils passent la nuit à la belle étoile, le long des artères principales et des boulevards. Certains se promènent en tenue d’Adam en pleine ville. Ce qui est déshonorant pour la dignité humaine. Ce phénomène constitue un danger permanent pour la population. A Rufisque, par exemple, le non-encadrement de ces fous constitue un danger, non seulement pour les populations rufisquoises, mais aussi pour la nation entière. Nous avons essayé d’en savoir plus auprès des spécialistes de la psychiatrie.
A l’hôpital psychiatrique de Thiaroye, les services des soins externes reçoivent chaque jour des malades qui font la queue devant les portes. Le Docteur Aïda Sylla, présidente de la commission médicale de l’établissement, estime que le problème du nombre croissant des malades mentaux doit être posé sur un autre angle. ’Beaucoup se disent que le nombre de malades est très élevé. Mais on peut bien se demander si ces malades mentaux sont proportionnels à une population devenue plus nombreuse. Alors, les gens sont-ils mieux sensibilisés par rapport à l’existence de spécialistes qui prennent en charge ces malades ?’, s’interroge le Dr Sylla. La spécialiste recommande ainsi aux familles d’être présentes aux côtés de leurs malades. ‘Vous entendez souvent parler d’accompagnants. Nous demandons qu’un membre de la famille reste à l’hôpital avec le patient. Cela lui permet de se familiariser avec la maladie mentale, de démystifier certaines choses, d’avoir moins peur et de pouvoir, devant certains signes, donner l’alerte, avant d’entreprendre quoi que ce soit’, explique le Dr Sylla.
Les malades mentaux reçus au centre de Thiaroye sont de toutes les classes d’âge. Cependant, il y a un lien évident entre la prise de drogue et la maladie. Par contre, l’hôpital de Thiaroye ne reçoit pas seulement des drogués. Les malades traités dans le centre guérissent tous, nous dit-on. Et quand ils ont un bon encadrement, ils peuvent mener une vie tout à fait autonome. Cependant, les problèmes de l’hôpital psychiatrique sont liés à l’inexistence d’une infirmerie spéciale pour les malades en régime d’internat. ’Ce sont souvent des malades raflés, des malades qui ont des difficultés avec la justice. Et le gros problème est que ces malades sont complètement désintégrés au plan social. Souvent, ils n’ont pas de famille pour les guider à leur sortie. Parfois, ce sont des inconnus dont nous ne connaissons rien du tout, ni l’âge, ni les maladies qu’ils avaient antérieurement. Ce sont des malades qui ne parlent pas. Et une fois sortis, et que leur état s’améliore, nous avons des difficultés à les intégrer quelque part. Ils restent ainsi à l’hôpital sans soutien ou ils retournent dans la rue. Et c’est à ce moment que leur état de santé va péricliter’, explique toujours le docteur Sylla.
Les malades mentaux au Sénégal ont besoin d’autres structures relais chargées de la post-cure pour assurer leur insertion sociale.
L’Assam court derrière une audience avec le chef de l’Etat
L’Association pour le suivi et l’assistance des malades mentaux (Assam) est sortie de ses gonds pour exiger que les droits des malades mentaux soient respectés. Selon son président, Ansoumana Ndione, qui organisait une conférence de presse à Rufisque, plusieurs demandes d’audience auprès du président Wade sont restées sans suite. Déjà en 2002, rappelle-t-il, un sit-in à la présidence s’était terminé dans les locaux du commissariat central de Dakar. Pourtant, selon Ansoumana Dione, le président de la République avait donné son accord pour la construction à Kaolack d’un centre d’encadrement et de traitement des malades mentaux d’une valeur de 8 millions. Entamé le 14 mai 2004, le chantier qui devait être réceptionné depuis le 14 janvier 2005 ne l’est toujours pas. Aussi dans la loi de finance 2007 du ministère de la Solidarité nationale, un budget de plusieurs centaines de millions avait été prévu pour l’équipement et le fonctionnement dudit centre et rien n’a été fait, selon M. Dione. ‘C’est pourquoi, vu la situation actuelle avec le nombre croissant de malades mentaux errant dans toutes les villes du Sénégal et tout ce que cela comporte comme dangers pour les populations, nous demandons au président Wade de nous recevoir pour évaluer et ouvrir ce centre pour l’intérêt des malades mentaux’, indique Ansoumana Dione.
Najib SAGNA
Source:
http://www.walf.sn