A cause d’un manque de maturité, les enfants nés en fin d’année redoublent plus que leurs camarades nés en janvier, révèle une étude. Un retard qui persiste toute la vie : de l’orientation scolaire aux diplômes jusqu’au salaire.
Pour jouir d’une scolarité et d’une carrière brillantes, il ne fait pas bon d’être un sagittaire ou un capricorne du premier décan. Une prédiction à mettre sur le compte non des astres mais de notre date de naissance… Une publication de Julien Grenet, chercheur en économie au CNRS, dévoilée mardi par Le Monde, montre que les natifs du mois de décembre ont plus de risques de connaître une scolarité difficile que leurs camarades, nés onze mois plus tôt en janvier. Parce que les enfants de fin d’année, plus jeunes, seraient intellectuellement moins mûrs que leurs aînés au moment du passage des évaluations, ils obtiennent des résultats scolaires moins bons, pointe l’auteur de l’étude Julien Grenet. Cette faiblesse est particulièrement notable en primaire et davantage prononcée chez les enfants issus de milieux défavorisés.
Ainsi, un écart de onze mois fait perdre sept places dans une classe de 30 élèves en CP et cinq en CE2, a trouvé Julien Grenet. En CP, les élèves nés en fin d’année obtiennent en moyenne des scores inférieurs de 66 % d’un écart type à ceux de leurs camarades nés en janvier. Les difficultés s’estompent au fil de la scolarité. Etre décembriste peut encore faire perdre trois à quatre places au classement général en 6e, et en deux places à la fin du collège en 3e. Pis, un enfant risque de porter ce handicap toute sa vie. Les travaux de Julien Grenet révèlent que le système éducatif français, qui oriente dès la 3e et pratique facilement le redoublement, amplifie les effets du mois de naissance, qui sont loin d’être transitoires comme on l’espérait.
Les difficultés scolaires des enfants nés en décembre augmentent leurs chances de redoubler, ce qui favorise une admission en lycée professionnel. Ainsi, la probabilité de refaire une année est deux fois plus élevée pour les élèves âgés de 11 ans nés en décembre. A 15 ans, 51 % d’entre eux contre seulement 35 % de ceux nés en janvier ont redoublé. Le chercheur en économie au CNRS et à l’Ecole d’Economie de Paris relève également que la probabilité de redoubler est deux fois plus forte pour les décembristes de 11 ans socialement défavorisés que ceux issus de milieux favorisés.
Un manque à gagner chiffré à 12.000 euros
Or, un retard dans le parcours scolaire se traduit par une probabilité plus grande de quitter l’école avec un diplôme de l’enseignement professionnel (+ 3 points) plutôt qu’avec un diplôme de l’enseignement général. L’impact du mois de naissance sur les diplômes pénalise davantage les hommes que les femmes. Chez les hommes, une naissance tardive réduit globalement le niveau des diplômes obtenus à l’issue de la scolarité. Chez les femmes, l’effet du mois de naissance porte surtout sur le type de diplôme obtenu (professionnel/général). Elles poursuivent études plus longtemps et sortent davantage diplômées de l’enseignement supérieur professionnel.
Cet écart dans les diplômes a une incidence sur les salaires mais elle est minime. Pour Julien Grenet, cela montre que voir le jour au mois de décembre influence moins le niveau de diplôme que le type de formation suivie. Les décembristes ont des fiches de paye très légèrement inférieures à ceux qui sont nés en janvier, 2,3 % pour les hommes, 0,7 % chez les femmes. Cet écart de 1,5% représente un manque à gagner de 12.000 euros sur une carrière de 42 ans, a calculé Le Monde. Etre né en décembre rend plus difficile la réussite aux concours de la fonction publique (- 1 point) et augmente de 0,5% le risque d’être au chômage.
Le phénomène également observé à l’étranger
Ces inégalités liées à l’âge dans les difficultés scolaire se retrouvent à l’étranger. Au Royaume-Uni, une classe comporte des élèves nés entre le 1er septembre et le 31 août. Les élèves défavorisés sont donc outre-Manche les natifs de l’été. Certains de nos voisins européens ont essayé de corriger le retard entraîné par le mois de naissance. Les Pays-Bas permettent ainsi aux enfants nés à la fin de l’année de rester deux ans en CP pour mieux se préparer, rappelle Le Monde. Julien Grenet suggère lui que les notes des plus jeunes écoliers de primaires soient pondérées en fonction de leur mois de naissance.
Par Constance Jamet
30/12/2010
Source: http://www.lefigaro.fr/