Enseignement supérieur, : Faut-il privatiser les universités ?
A l’heure où les grandes écoles terminent leur année universitaire, le débat est ouvert pour un enseignement supérieur de qualité. Un opérateur économique penche pour une privatisation partielle du secteur éducation. Un enseignant-chercheur suggère l’élitisme par l’excellence mais toujours appuyé par l’Etat.
Après la publication du classement 2004 des quelques milliers d’écoles américaines de gestion aptes à délivrer le fameux MBA ou un Bac + 6, quelques opérateurs économiques de formation américaine, rappellent qu’aux USA, il n’y a pas de diplômes reconnus par l’Etat. C’est la réputation du business school qui établit sa valeur marchande sur le marché de l’emploi. Elle s’acquiert avec l’identification des besoins en compétences du milieu des entreprises et les réponses proposées. Un plongeon dans le classement traduit donc une baisse des financements pour un business school.
Selon un opérateur formé à l’université de Michigan, l’adéquation formation/emploi est une réalité du marché. Et à l’heure où des grandes écoles malgaches terminent l’année universitaire, il remarque :
« Les moyens de l’Etat malgache ne permettront jamais d’avoir un enseignement de qualité répondant aux besoins des entreprises. Il faut laisser l’enseignement supérieur au secteur privé. Cela allègera les charges de l’Etat qui doit continuer à s’occuper de l’éducation primaire. Soit, nous optons pour cette approche libérale et élitiste qui revalorise aussi nos enseignants, soit nous gardons le système socialiste actuel avec ses résultats peu convaincants. Il faut ouvrir ce débat ». Un enseignant-chercheur de l’Ecole supérieure des sciences agronomiques (ESSA) n’abonde pas dans le sens de cet opérateur.
Même s’il n’est pas pour
« l’université pour le petit peuple» véhiculé depuis 1972, il prône l’élitisme par l’excellence comme on le fait déjà dans les grandes écoles comme à l’ESSA où « le concours d’entrée est parmi les rares examens les plus rigoureux et honnêtes organisés dans le pays ». C’est à l’Etat de fournir ensuite l’appui logistique et financier pour les établissements concernés et les étudiants rigoureusement sélectionnés. Depuis une décennie, l’Etat encourage les universités et grandes écoles à développer leurs propres ressources via des contrats avec le privé. Mais le constat est là : à la Vitrine de Madagascar et aux journées du Fonds d’appui au développement de l’enseignement supérieur (Fades), les entreprises désertent le stand de l’université.
Notre interlocuteur explique : « Dans les recherches appliquées de haut niveau qui profitent à une filière, les groupements professionnels n’ont pas les moyens d’appuyer les chercheurs, le Gapcm est probablement le seul à avoir les reins solides. Prenons un exemple, une recherche sur les normes des huiles essentielles a obtenu du Fades une enveloppe de 85.000 dollars, la contribution du groupement concerné étant de 17.000 dollars. Il n’a pas cet argent. Après avoir frappé à toutes les portes, il n’a pas trouvé la somme demandée. On a dû revoir à la baisse le montant du projet ». Pour les études et inventions immédiatement applicables à une activité, le même problème se pose. « La grande majorité des sociétés ne sont que des petites et micro-entreprises au sens européen du terme. Mais quand elles sont obligées de recruter un bureau d’études international pour avoir un marché, elles le paient 10 fois plus qu’un national et 30 fois plus qu’un thésard à compétences égales ».
A part le manque de moyens, les entreprises ont tendance à assimiler l’université à un bien de l’Etat et donc à un accès gratuit à ses services. Il avance, malgré tout, que la privatisation n’est pas une solution : « En 3ème cycle, l’enseignement payant commence à faire son entrée, mais un écolage annuel de 5 millions de Fmg est déjà jugé très élevé. Une classe de 20 étudiants rapportera 100 millions et que peut-on faire avec, quand on sait que pour des travaux de laboratoire, un litre de chloroforme pour l’extraction des matières grasses vaut 400.000 Fmg ? » Bref, l’enseignement supérieur est dans une impasse. La solution selon l’enseignant-chercheur est de continuer les projets de type Fades et de les pérenniser, ou de prélever carrément une partie des taxes sur les entreprises pour un Fonds destiné à la recherche. Les fruits de cette collecte devraient faire l’objet d’un concours de projets et que le meilleur gagne !