Les universités françaises encore à la traîne
ANNE-NOÉMIE DORION.
Publié le 04 août 2007
Source: Le Figaro
En légère progression, la France fait toujours figure de mauvais élève dans le classement de Shanghaï des universités mondiales.
LA PROGRESSION est modeste : en 2007, deux nouvelles universités françaises, Rennes-I et Lille-I, entrent dans le classement de Shanghaï. Bien que l’École supérieure de physique et chimie industrielles l’ait quitté, vingt-deux établissements tricolores figurent désormais dans ce recensement des 500 meilleures universités du monde, établi par l’université chinoise Jiao Tong depuis 2003.
Pour l’édition 2007, la France conserve sa place, se maintenant au 6e rang mondial, ex aequo avec le Canada. Seules quatre universités made in France font partie du top 100 : Paris-VI Pierre-et-Marie-Curie se hisse à la 6e place européenne et la 39e mondiale, gardant la tête des établissements tricolores, devant Paris-XI (52e mondiale), l’ENS-Paris (83e mondiale) et Strasbourg-I (99e mondiale), toutes mieux placées que l’année précédente. Sensible, la progression ne masque pas pour autant les piètres performances hexagonales.
Tandis que la plupart des facs françaises sélectionnées continuent de fréquenter les bas-fonds du classement, les États-Unis concentrent à eux seuls 17 des 20 meilleurs établissements, le Royaume-Uni et l’Allemagne restent loin devant l’Hexagone avec respectivement 42 et 41 facs dans le palmarès. Harvard, Stanford, Berkeley et Cambridge tiennent d’ailleurs toujours le haut du pavé.
Manque de moyens
Des résultats décevants à l’heure où le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Valérie Pécresse, veut redonner à l’université ses lettres de noblesse, et en faire un mode d’établissement compétitif au niveau mondial, « lieu par excellence de la construction de la connaissance ». Même les pôles de recherche et d’enseignement supérieur (Pres) créés par la loi d’avril 2006, destinée à rendre les universités plus compétitives en favorisant leur rapprochement, n’ont pas suffi à changer la donne.
Pourquoi la France est-elle incapable d’obtenir une meilleure place dans le hit-parade de l’enseignement supérieur ? « Malgré un potentiel humain extraordinaire, la France ne dépense pas assez pour son université, déplore Jean-Robert Pitte, président de Paris-IV la Sorbonne. II ne faut pas s’étonner que le dernier pays de l’OCDE en matière de coût de revient d’un étudiant soit la cinquième roue du carrosse. Ces résultats doivent attirer l’attention sur la faiblesse des financements de la formation supérieure et surtout de la recherche. Puisque même les pays émergents comme l’Inde et la Chine investissent dans ce secteur, nous risquons de finir par le payer cher. »
Néanmoins, le manque de moyens français ne semble pas être seul en cause. Principalement fondé sur les aptitudes en matière de recherche, le classement de Shanghaï ne préjuge pas forcément du niveau de formation des facs en licence et master.
En outre, le nombre de citations, de publications, ou de prix décernés, qui constituent les principaux critères de sélection, ne comptabilise pas les travaux francophones, pourtant nombreux. Ce mode d’évaluation fait la part belle aux disciplines scientifiques. « Dans les sciences humaines et sociales, les publications, souvent francophones et plus dispersées, offrent moins de visibilité. Et les prix sont moins nombreux », regrette le président Pitte. Ainsi Paris-IV, qui n’apparaît pas dans le classement de Shanghaï, est arrivée 16e dans le classement annuel par discipline du Times.
La particularité de l’enseignement supérieur français handicape aussi les établissements universitaires. Davantage enclins à se revendiquer des grandes écoles que des universités, alors que c’est dans ces dernières qu’ils effectuent leurs travaux, les chercheurs font baisser artificiellement le rendement de publication des facs. Une manie qui agace Jean-Robert Pitte. « Ce n’est pourtant pas dans les grandes écoles que réside le vrai potentiel de dynamisme et d’imagination ! »