Conférence Unesco : le e-learning doit faire doubler le nombre d’étudiants des pays du Sud
« Le système traditionnel d’enseignement ne peut relever les défis liés à la massification de l’enseignement supérieur. Si on veut progresser dans la société de la connaissance et augmenter le taux d’inscription dans le supérieur, on a vu les progrès permis par les TIC et le privé ». Abdul Waheed Khan, le sous-directeur pour la communication et l’information de l’Unesco, a donné le ton d’entrée de jeu lors de l’atelier consacré aux TIC (technologies de l’information et de la communication) à la conférence mondiale sur l’enseignement supérieur de l’Unesco organisé du 5 au 8 juillet 2009 à Paris.
Doubler le nombre d’étudiants dans les pays pauvres
Egalement président de l’université de New Delhi, Abdul Waheed Khan a clairement affiché sa volonté de s’appuyer sur les TIC pour faire passer la part des étudiants des pays en voie de développement de 10 % à 20 %. Une volonté qui fait aussi écho aux déclarations du président sénégalais Abdoulaye Wade fin mai 2009 insistant sur le fait que la technologie permettait désormais aux étudiants africains d’accéder aux meilleures universités.
"A l’heure où l’Europe ferme ses portes, le e-learning est la réponse pour les étudiants africains" avait-il polémiqué lors de la conférence internationale E-learning Africa. Didier Oillo, directeur de programme "Innovation par les Tice" de l’Agence universitaire de la francophonie (AUF), a d’ailleurs rappelé opportunément que les Pays-Bas avaient économisé 133 millions d’euros grâce à ces nouvelles méthodes de transmission des connaissances.
Les enseignants, moteurs de la FOAD
Une question qui remet au cœur de la réflexion la place de l’enseignant dans la FOAD (formation ouverte et à distance). « Aucune réforme ne peut être menée sans les enseignants », a commenté Zhang Deming pour qui « le fossé numérique doit se transformer en opportunité numérique ». Le président de la Shanghai Television University a montré comment son établissement, créé dans les années 1960, avait réussi à former 4 millions de Chinois en s’appuyant sur l’implication intense des enseignants et la transformation de l’enseignement avec des campus virtuels et la diffusion de programmes par le réseau satellitaire.
Si Dele Braimoh, son homologue sud-africain de l’UNISA, un établissement d’enseignement à distance en ligne, partage la volonté de mettre les TIC au service de la massification de l’enseignement supérieur, il a davantage mis l’accent sur les difficultés pour impliquer les universitaires dans l’EAD. Autres freins au développement des TIC : les insuffisances techniques de base comme le manque d’électricité ou le manque de personnels formés mais aussi la faible reconnaissance de la part du gouvernement pour ce type d’enseignement.
« Les jeunes mèneront la révolution en quittant nos institutions »
Si certains participants de la conférence de l’Unesco ont mis en avant les réticences des enseignants, d’autres ont prévenu que le fossé avec les jeunes, nés avec les nouvelles technologies et fortement demandeurs de TICE, prévaudrait. « Les jeunes mèneront la révolution en quittant nos institutions. Qui blogue sur ces conférences, qui utilise les Twitters ? Les jeunes fabriquent leur propre connaissance. Notre réflexion aujourd’hui n’a que peu de sens. Ce qu’il faut regarder, ce sont les usages que la jeunesse fait des nouvelles technologies », a lancé Frits Pannekoek, président du Conseil international pour l’éducation ouverte et à distance et président de l’université Athabasca (Canada). Un fossé désormais culturel !
TIC : une révolution conceptuelle
Le fossé numérique (taux d’équipement ou taille de la bande passante), comme dans les années 1980 n’a pas disparu. Les intervenants des pays développés, émergents et en voie de développement ont en outre fait le constat de nouveaux fossés, en train de se creuser ou de se réduire. Au titre des évolutions inattendues, Frits Pannekoek, a insisté sur la moindre domination de l’anglais sur Internet et sur la plus large présence des cultures autochtones.
En revanche, il voit se dessiner un nouveau fossé numérique « plus profond et plus complexe», avec l’impression donnée que « les appareils mobiles donneraient un apprentissage suffisamment bon mais pas excellent [comme le système traditionnel d’enseignement] ». Autre crainte mise en perspective, « si les connaissances sont mises en open source, va-t-on continuer à investir dans le capital humain des universités ? ». Pour Frits Pannekoek, « les TIC transforment la connaissance en bien abondant alors qu’il était rare. La transformation de la nature et de la valeur de la connaissance nous fait changer de paradigme ».
Fabienne Guimont
21.07.09
Source: http://www.educpros.fr