Guinée Conakry – Université de Conakry : Le Premier Ministre et trois autres ministres conspués par les étudiants
ExcelAfrica – [20/05/05]
Le 17 mai dernier, la salle des fêtes de l’université Gamal Abdel Nasser de Conakry a servi de cadre pour l’inauguration des "Journées Scientifiques de l’Université Guinéenne".
Pour donner une coloration particulière à l’événement, plusieurs hautes personnalités étaient invitées dont le Premier Ministre, Cellou Dalein Diallo, les ministres de l’Enseignement Supérieur, Sékou Décazy Camara, de l’Enseignement Pré-Universitaire, Galéma Guilavogui, et celui de l’Enseignement Technique Ibrahima Soumah.
Dans une salle bondée d’étudiants, la délégation gouvernementale conduite par Monsieur le Premier Ministre n’a pas eu tous les honneurs de réception de la part des étudiants du campus principal de Conakry qui manifestaient leur mécontentement par des mots du genre: "Voleurs, Démagogues…"
Sur la tribune, Sékou Décazy Camara a été interrompu dans son discours par les étudiants. Furieux contre ce dernier, ils ont lancé des refrains: « Décazy, ministre zéro, Décazy, assassin ! » .
Les organisateurs essayèrent de calmer les esprits, mais les étudiants plus que jamais engagés contre l’homme qu’ils considèrent comme leur ennemi juré n’ont pas accepté qu’il termine son discours.
La suite était indescriptible en huées. Le Premier Ministre tenta lui aussi de prononcer son discours mais l’hymne national entonné par les étudiants emplissait déjà la salle accompagné de cris ahurissants. Lors de la pause, le ministre Ibrahima Soumah a confondu étudiants et militants du PUP (entendez le Parti de l’Unité et du Progrès – le parti au pouvoir) en lançant le slogan : Vive le Président Lansana Conté !. Aussitôt prononcé, aussitôt les étudiants ont réagi. Des voix s’élevèrent dans la salle. Injuriés et invités à quitter la salle avant qu’ils ne soient lynchés, les "illustres invités" de Monsieur le recteur ont pris la poudre d’escampette par la porte de sortie de secours de la salle grâce à l’intervention d’un renfort des forces de l’ordre.
Cet état de fait est l’une des conséquences de la dernière grève des étudiants qui remonte au 26 novembre 2004 et qui a conduit à la radiation d’étudiants ne réclamant que de meilleures conditions de vie et d’études.
Un étudiant qui a préféré garder l’anonymat, nous déclarait à la suite de cet incident: « Ce sont des méchants réunis, ils ont bien mérité ça ce matin. Ils ne portent aucune considération à la plate-forme revendicative des étudiants. La cause, ils ont tous leurs progénitures à l’étranger dans les universités qu’ils payent grâce aux impôts payés par nos parents qui n’arrivent plus à subvenir aux besoins les plus élémentaires» . « Les "lettres ouvertes" adressées au Premier Ministre n’ont été que des lettres mortes. A l’heure où je vous parle quatre des nôtres croupissent en prison et attendent leur procès ». Ajoute un autre étudiant.
Aux dernières nouvelles, les doyens des facultés de l’université de Conakry sont suspendus jusqu’à nouvel ordre et la rumeur faisant état de leur remplacement se répand aujourd’hui sur le campus comme une traînée de poudre.
Par TOURE Fodé Saliou
Correspondant d’ExcelAfrica en Guinée