Burkina-Faso – La 1ère femme burkinabé Docteur ès Géographie de la santé

Soutenance de Thèse de Doctorat : La 1ère femme burkinabé Docteur ès Géographie de la santé

« Que vient faire une géographe de la santé au Secrétariat permanent du Conseil national de lutte contre le VIH/sida et les IST (SP/CNLS), s’est écrié le colonel major Joseph André TIENDREBEOGO, Secrétaire permanent du CNLS, lorsque, il y a 4 ans, Edwige NIKIEMA a souhaité y faire son stage. Cette boutade est d’autant plus légitime que ce n’est pas l’imaginaire que le commun des mortels se fait de la géographie et du géographe. Pourtant, si la géographie est comprise comme la science qui a pour objet l’observation,

la description et l’explication des phénomènes physiques, biologiques et humains à la surface du globe, et l’étude de leur répartition, alors il faut admettre que l’aspect géographique des recherches et des actions sur le sida a été pendant longtemps un maillon qui a manqué à la chaîne de lutte. C’est en cela qu’il convient de juger avec pertinence les travaux de mademoiselle NIKIEMA, élevée le 8 décembre 2008, au grade de Docteur en Géographie de la santé de l’Université Paris XII Val De Marne en France.

« Prise en charge thérapeutique des personnes vivant avec le VIH et territorialités, exemple du Burkina Faso » : c’est le titre de la thèse de Doctorat en Géographie de la santé que le Dr. Edwige NIKIEMA a soutenue publiquement à Paris. Une thèse d’une très grande qualité qui a conduit le jury à regretter la suppression récente en France de l’attribution des mentions à cause des polémiques qu’elle suscitait au sein des jurys. Le jury composé du Pr. Michel LESOURD (président de jury), du Pr. Gérard SALEM (rapporteur), du Dr. Aimé Joseph BIDIGA, représentant le Secrétaire permanent empêché et du Pr. Jeanne Marie AMAT-ROZE (directrice de thèse), en témoignage de la qualité et de l’originalité du sujet n’a ordonné aucune correction.

Trois principales raisons expliquent le choix de ce thème : l’évolution de l’infection à VIH au Burkina Faso qui est passée de 7,1% en 1997 à 1,6% en 2007. Cette réalité statistique, témoin d’une régression, voire d’une stabilisation de l’infection, fait oublier que sur 130 000 personnes (dont 10 000 enfants) qui vivent avec le VIH, ce sont seulement 17 263 personnes (dont 649 enfants) qui bénéficient d’une prise en charge thérapeutique. L’impétrante NIKIEMA a été poussée, en tant que femme, à s’intéresser au sujet parce que plus de 60% des personnes vivant avec le VIH (PVVIH) sont des femmes en Afrique subsaharienne.

Après ces constats, la chercheuse, qui s’intéresse à la prise en charge thérapeutique, s’est préoccupée de savoir quels étaient les accès aux soins, les acteurs en présence et les conséquences à tirer de l’état des lieux de l’offre nationale de soins liés à l’infection. Ses recherches qui viennent d’aboutir sont parties d’une hypothèse principale : la prise en charge thérapeutique est facteur d’une déstabilisation spatiale, liée soit au lieu ou aux conditions socioéconomiques de vie des personnes vivant avec le VIH, soit à la mobilité induite par la quête de soins. Pour vérifier cette hypothèse sur le terrain, elle a choisi quatre sites d’enquêtes qui sont le Yatenga, le Kadiogo, le Boulgou et le Poni. Elle a interrogé 10% des personnes vivant avec le VIH (PVVIH) sous ARV en 2006 soit 402 personnes dont 91% de femmes.

Selon le Dr. BIDIGA, les recherches de Mlle NIKIEMA ont déjà fait tâche d’huile au CNLS puisque ce dernier n’a pas attendu ses conclusions pour élargir la couverture thérapeutique. En effet, reconnaît-il, en 2004-2005, lorsqu’elle débutait son stage, l’effet « Ouagadougou la capitale » (A rajouter) était assez prégnant, puisque la plupart des malades parcouraient de longues distances pour se faire soigner à la capitale ou à Bobo-Dioulasso. Au cours d’une session du Conseil national de lutte contre le sida et les IST, Edwige NIKIEMA avait d’ailleurs présenté une communication sur l’apport des systèmes d’informations géographiques (SIG) à la lutte contre l’infection à VIH, en présence du Chef de l’Etat ; ce qui lui avait valu des félicitations publiques.

Le travail qui vient d’être défendu et accepté par les spécialistes de la Géographie de la santé se présente comme un observatoire du VIH dans notre pays. Il révèle la progression du maillage de l’offre de soins liés à l’infection à VIH, un essaimage progressif de l’offre sur tout le territoire dans la mesure où chaque chef lieu de province (exception faite de trois) est à même de les offrir. En comparaison à d’autres maladies et à d’autres besoins de soins, il y a là une équité spatiale sans précédente, résultant d’une mobilisation à tous les niveaux.

Cet observatoire montre également que les femmes sont plus enclines à fréquenter les centres de soins. C’est un constat qui peut déplacer dans un court terme les niveaux et les moyens de prise en charge au Burkina. Il faut donc chercher à booster la fréquentation des formations sanitaires par les hommes vivant avec le VIH.

Avec ce travail scientifique, Edwige NIKIEMA devient la première femme Docteur en Géographie de la santé au Burkina Faso. C’est une nouvelle expertise pour la planification et la mise en œuvre des actions de santé en général et de l’amélioration des conditions d’accès aux soins des personnes vivant avec le VIH dans notre pays.

EPB

L’Eveil Education
12/01/09

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