Au Royaume-Uni, l’éducation sexuelle dès la maternelle
Après deux ans de consultations, le gouvernement britannique s’est décidé à inscrire au programme scolaire l’éducation sexuelle et l’étude des relations humaines. A compter de la rentrée 2011, les enfants âgés de 5 à 16 ans (âge légal de la majorité sexuelle au Royaume-Uni) découvriront cette nouvelle matière, a annoncé, jeudi 5 novembre, Ed Balls, le ministre de l’éducation.
Londres entend ainsi lutter contre le taux de grossesse particulièrement élevé des adolescentes. En la matière, a calculé l’Organisation de coopération et développement économiques (OCDE), le Royaume-Uni arrive en quatrième position, derrière le Mexique, la Turquie et les Etats-Unis. Tous les ans, près de 40 000 jeunes filles de moins de 18 ans sont enceintes. En 2007, dernière année pour laquelle les statistiques sont connues, on a compté 4 376 avortements chez les moins de 16 ans, 10 % de plus qu’en 2006.
Dans ce contexte, les Britanniques se sont inspirés du pays européen qui a le plus faible taux de grossesse parmi ses adolescentes, mais aussi le moins de maladies sexuellement transmissibles (MST) chez ses jeunes et un des taux d’avortement les plus bas : les Pays-Bas.
Comme leurs camarades néerlandais, les petits Britanniques apprendront dorénavant en primaire à nommer toutes les parties de leur corps, y compris les plus intimes. Ils se pencheront aussi, avec leur maîtresse, sur la nature des liens qui les unissent à leurs parents ainsi qu’aux différents membres de leur famille. Avant de parler puberté, émotions, mariage, divorce, pacs…
Dans le secondaire, les adolescents anglais aborderont vraiment le sujet. La sexualité, la reproduction, la contraception, la grossesse, les MST, n’auront plus de secrets pour eux. Il leur faudra aussi réfléchir, avec leurs professeurs, à ce qu’est une relation stable, aux effets des ruptures, aux différences entre les gens. Sans oublier une partie pratique qui leur permettra de savoir où trouver des informations dont ils pourraient avoir besoin. L’idée, a expliqué M. Balls, c’est de leur apprendre "à naviguer dans la complexité de la vie moderne".
OPPOSITION RELIGIEUSE
Jusqu’ici, l’éducation sexuelle était laissée au libre arbitre des écoles, et les élèves n’étaient en aucun cas obligés de s’y intéresser. Dorénavant, tous les établissements scolaires seront tenus de l’enseigner. Cela dit, Downing Street n’est pas allé au bout de la logique : les cours ne seront obligatoires que pour les plus de 15 ans, les autres pourront s’en dispenser. Certaines associations de parents d’élèves voyaient d’un mauvais oeil l’étude de cette matière à l’école et ont milité pour qu’elle soit facultative. Mais c’est des principaux mouvements religieux catholiques et musulmans qu’est venue l’opposition la plus forte.
Un tiers des écoles anglaises sont des faith school, parfois privées, souvent publiques, dont l’enseignement religieux est quelquefois peu compatible avec ce nouveau programme. "Vous pouvez vanter le mariage. Apprendre à vos élèves qu’il ne faut pas avoir de relations sexuelles en dehors de ce lien, leur a expliqué Ed Balls, mais vous ne pouvez pas priver les jeunes d’information sur la contraception" et l’avortement.
Virginie Malingre (Londres, correspondante)
7 novembre 09
Source: http://www.lemonde.fr