Ambassade du Cameroun en Centrafrique

Ambassade du Cameroun en Centrafrique
Source :
http://www.lemessager.net
12/05/2005
L’oubliée de la politique étrangère du Cameroun
La représentation diplomatique tire le diable par la queue. Le poste d’ambassadeur est vacant depuis cinq ans.

L’ambassade du Cameroun en République Centrafricaine est comme ce roseau qui plie mais ne rompt jamais. En effet, ce bout de territoire camerounais en terre banguissoise mène au quotidien le combat de la survie. Un combat qui se décline en plusieurs tableaux. Primo : l’insuffisance des personnels chargés de mettre en œuvre la politique étrangère du Cameroun. Actuellement, l’ambassade du Cameroun en Rca ne compte que trois cadres ayant le statut de diplomate. Un seul parmi eux, en l’occurrence le chargé d’affaires par intérim, a reçu une formation de base en relations internationales. En poste depuis le début des années 1990, Faustin Ngongueu est le gardien du temple. Il liquide les affaires courantes de l’ambassade, en attendant que le poste d’ambassadeur (vacant depuis près de cinq ans) soit pourvu.

secundo
En attendant, la politique étrangère du Cameroun en Rca reste une nébuleuse. Notamment dans le contexte actuel, marqué par le parachèvement du processus électoral à travers des élections présidentielle et législatives. “ A priori, explique le chargé d’affaires, le principe de la politique étrangère du Cameroun est la non – ingérence et les relations de bon voisinage ”. Un lot de consolation qui trahit des manquements graves de la part du plus grand pays de la sous-région. Paradoxe : le Cameroun affiche son indifférence à la Rca, alors que la plupart des pays d’Afrique centrale (Tchad, Congo Brazzaville et Gabon) lui multiplient des appels de pied.
Les difficultés logistiques éprouvées par l’ambassade du Cameroun en Centrafrique en rajoutent à la précarité.
Vraisemblablement, les moyens manquent le plus dans cette chancellerie. Ce qui limite la marge de manœuvre des responsables en poste. Faustin Ngongueu, le chargé d’affaires s’en défend : “ L’encadrement de la colonie camerounaise ne va pas sans difficultés. Nos compatriotes viennent parfois solliciter de l’assistance que nous n’avons pas. Ils ne comprennent pas que nous ne sommes pas une œuvre humanitaire ”.

Tertio
L’ambassade du Cameroun à Bangui est par ailleurs confrontée au sous-équipement et au manque criard du matériel de travail. Pillée le 15 mars 2003, à l’occasion du coup d’Etat ayant conduit François Bozizé au pouvoir, l’ambassade du Cameroun est une coquille vide (aux sens figuré et propre). Le parc informatique, le coffre-fort et tout le matériel de secrétariat emportés par les Zakawas (rebelles tchadiens armés accompagnant François Bozizé lors de sa prise de pouvoir) n’ont jamais été remplacés. Les véhicules de la chancellerie, emportés par les mutins, ont certes été retrouvés. Mais, ils ne servent plus à rien. Et pour cause, ils sont endommagés.
Les personnels de l’ambassade vivotent également. Tous, à l’image de Faustin Ngongueu, ont subi sans mot dire les pillages de leurs domiciles respectifs. Une source à l’ambassade du Cameroun à Bangui indique : “ l’entrée victorieuse de François Bozizé dans la ville de Bangui a donné lieu à des pillages ciblés. Les Camerounais en ont fait la triste expérience. Nous avons été visité plusieurs fois dans nos domiciles. Et chacun de nous a perdu tous ses objets de valeur ”. Depuis, les uns et les autres tirent le diable par la queue.
L’insécurité
Face à ce climat d’insécurité, le chargé d’affaires intérimaire en poste a choisi de signer un contrat avec une société de gardiennage dénommée BCAG3. Six éléments de cette société, répartis en deux équipes, assurent la protection de l’ambassade du Cameroun et de la résidence de l’ambassadeur. Ceux qui ne peuvent pas se payer des agents de sécurité multiplient des trésors d’ingéniosité. “ Certains compatriotes du président Paul Biya ont pour la plupart d’entre eux pris la nationalité centrafricaine. Il s’agit surtout de ceux qui font dans le secteur informel, notamment les chauffeurs de taxi ”, explique le chargé d’affaires du Cameroun à Bangui. Les moins téméraires ont simplement choisi de changer de terre d’accueil.
Thierry Ndong
à Bangui

Repères
– Environ 80 Camerounais figurent sur les fiches d’enregistrement de l’ambassade du Cameroun. Mais, ce n’est qu’une donnée indicative. Comme l’explique le chargé d’affaires, certains de ses compatriotes ont parfois changé de nationalité. D’autres par ailleurs sont repartis ou arrivés sans s’annoncer. A l’en croire, les mouvements transfrontaliers rendent difficiles le pointage.
– Huit étudiants camerounais ont brillamment soutenu leur thèse de doctorat en médecine, en janvier dernier. Toutefois, indique-t-on, les candidats à une formation en médecine sont de moins en moins nombreux depuis la chasse aux sorcières des années 1997. Signe visible de ce désintérêt : l’Association des étudiants et élèves du Cameroun en Centrafrique, jadis dynamique, est aujourd’hui l’ombre d’elle-même.
– Les Camerounais de Centrafrique, opèrent pour la plupart dans le secteur informel. Quelques uns mènent avec un succès relatif des activités dans le secteur de la restauration, de la vente des produits cosmétiques, la menuiserie et l’exploitation forestière. Mais, précise-t-on, on ne trouve pas plus deux Camerounais dans chaque domaine précité.

Par Richard TOUNA
Le 12-05-2005

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *