Le système d’éducation allemand
Sur la sellette depuis 2001, année où la faiblesse des élèves allemands a été révélée par l’étude PISA1 de l’OCDE2, le système éducatif d’outre-Rhin est en pleine remise en question. Mais cette évolution, qui semble enfin porter ses fruits3, n’affecte pas les grands principes du modèle germanique.
Pour la deuxième année consécutive, les élèves allemands retournent en classe après la pause déjeuner. Une petite révolution dans un système réputé plus souple, plus libre et moins dense que le modèle français. Tandis que l’on installe des cantines dans les établissements des différents Länder4, les responsables de la politique éducative réfléchissent au moyen de remédier à la forte dispersion des résultats scolaires, caractéristique persistante de la République fédérale d’Allemagne5…
Gestion fédérale
Placée sous l’égide de la Kulturhoheit der Länder (souveraineté de la culture des Länder), l’éducation en Allemagne est administrée par les Etats fédérés et non par un appareil national. Néanmoins, dans une volonté de développer un système éducatif équitable, les Länder proposent un modèle scolaire unifié par la Kultusministerkonferenz (conférence permanente des Ministres de l’Education et des Affaires Culturelles). Ainsi, sur l’ensemble du territoire, le système d’éducation gratuit comporte trois grands secteurs : la scolarité d’enseignement général (primaire et secondaire), la formation professionnelle (très présente en RFA) et l’enseignement supérieur. L’éducation préscolaire, qui concerne les enfants âgés de trois à six ans, n’est pas du ressort du système d’éducation public, mais de celui de l’aide aux enfants et à la jeunesse. De fait, la fréquentation des Kindergärten (jardins d’enfants), structures traditionnelles et reconnues d’éducation élémentaire, demeure facultative.
Orientation précoce
Le cycle primaire qui concerne tous les enfants ayant soufflé leurs six bougies, se déroule dans les Grundschule (écoles locales). Il s’étend en général sur quatre années6 et constitue la seule base commune à l’ensemble des élèves. Au terme de cet enseignement, les parents peuvent envoyer leurs enfants dans une Hauptschule (école secondaire inférieure), une Realschule (école secondaire intermédiaire), un Gymnasium (école secondaire supérieure) ou encore une Getsamschule (école secondaire complète) qui combine les trois niveaux. « Ces établissements n’ont pas tous la même vocation : seul le Gymnasium conduit à l’Abitur (baccalauréat, ndlr) », explique Sylvie Schleipfner, professeur de français à Munich. « La Realschule permet d’accéder à une formation diplômante axée sur la pratique et bien reconnue dans le milieu professionnel tandis que la Hauptschule mène à un apprentissage souvent moins côté », poursuit l’enseignante. L’orientation des élèves se décide donc très tôt. Mais quelle que soit la voie choisie, la scolarité obligatoire dure toujours entre neuf et dix ans7. « Si les vocations professionnelles sont valorisées, le baccalauréat reste le diplôme phare du système allemand », note Sylvie Schleipfner. « D’un Länder à l’autre, les épreuves sont les mêmes. Il n’existe qu’une seule série de matières, seuls les coefficients varient en fonction du choix des élèves. La note globale obtenue est déterminante pour la suite des études ».
Formation professionnelle et enseignement supérieur
L’une des originalités du système allemand réside dans son mode de formation professionnelle où prévaut le duale system (système duel). Ce dispositif, ouvert aux élèves issus des deux types d’établissements secondaires (inférieures et secondaires), permet aux jeunes d’étudier en alternance dans les écoles professionnelles8 administrées par les Länder et de suivre une formation pratique dans des entreprises privées. Les élèves ont ensuite la possibilité d’entrer directement dans la vie active ou de poursuivre leurs études dans une Fachhochschule (université technique dite « des sciences appliquées »), voire dans une Fachschule (école de perfectionnement professionnel). Les jeunes Allemands qui ont décroché leur Abitur peuvent, quant à eux, rejoindre l’établissement de l’Hochschulwesen (enseignement supérieur) de leur choix. Universität (université), Kunsthochschule (école supérieure des arts), Musikhochschule (école supérieure de musique) ou Pädagogische Hochschule (établissement de formation des enseignants) : « la sélection se fait en fonction des notes totalisées au baccalauréat. Les meilleurs éléments sont les mieux servis », insiste Sylvie Schleipfner. Ces études supérieures, dont la durée réglementaire est de quatre ans, s’étalent bien souvent sur six années.
Fidèle à sa volonté de cultiver une approche égalitaire du système éducatif, la RFA ne compte ni grandes écoles, ni instituts de formation d’élite. Mais elle a su, a contrario, mettre en place un vrai réseau d’écoles spécialisées pour les enfants et les adolescents « différents » : élèves très doués, présentant un retard scolaire, des troubles comportementaux ou de l’apprentissage, élèves handicapés mentaux ou physiques, malvoyants, malentendants, sourds… Ces écoles existent à tous les niveaux du système scolaire et proposent en principe les mêmes Abschlüsse (diplômes) que les établissements classiques.
(1) Programme International pour le Suivi des Acquis des élèves. Le classement, établi en fonction du niveau scolaire des élèves de 15 ans de 32 pays industrialisés, avait, en 2000 (publié en 2001) placé la RFA dans la deuxième moitié du tableau.
(2) OCDE : Organisation de coopération et de développement économiques.
(3) Les résultats au PISA 2006 (publiés en décembre 2007) attestent que les élèves allemands ont des résultats nettement au-dessus de la moyenne de l’OCDE. En particulier en sciences où l’Allemagne se place au huitième rang (parmi les 30 pays évalués). Voir la synthèse des résultats de l’enquête PISA 2006.
(4) Nom donné aux Etats fédérés de la République fédérale d’Allemagne
(5) « Il continue d’exister un groupe important de très bons élèves de 15 ans. D’un autre côté, il y a aussi beaucoup trop d’élèves qui se situent dans les deux plus bas niveaux du classement. L’Allemagne demeure l’un des pays dans lesquels l’influence du milieu socio-économique est plus forte que dans la moyenne des pays de l’OCDE », source : OCDE, enquête PISA 2006.
(6) Sauf à Berlin et dans le Brandenburg (Brandebourg) où il comprend six classes.
(7) Selon les états.
(8) Il existe trois grands types d’écoles professionnelles : la Berufsaufbauschule (école de formation professionnelle), la Berufsfachschule (école professionnelle à plein temps) et la Fachoberschule (lycée d’enseignement technique).
Marie-Laure Maisonneuve
Source: http://www.vousnousils.fr
18/01/08