Pas facile la vie d’étudiant africain …
« Ici, il est de coutume de vivre en dessous du seuil de pauvreté et c’est ce que je fais. Je ne suis pas du tout frustré par cette réalité. Bien au contraire c’est une situation où mon sens de la débrouillardise fait des miracles et je me nourris de la conviction que si j’ai longue vie, mon lendemain sera meilleur. Ma famille est très nombreuse et je ne peux exiger quoi que ce soit d’elle. Cependant pour des cas d’urgence comme une hospitalisation par exemple, mes frères interviennent rapidement. Ce fut le cas à la veille de Pâque 2003, lorsque j’ai été victime d’une luxation complète de l’épaule gauche à la suite d’un faux mouvement. »
… même avec une bourse
« En ce qui concerne les bourses de l’A.M.C.I, elles sont payées par anticipation tous les deux mois. C’est à Rabat qu’a lieu le retrait du chéquier annuel (portant les dates de paiement pour l’année en cours) et le paiement de la première bourse. Exception faite de ceux qui vivent à Rabat, les dates de paiements indiquées sur les chéquiers ne sont pas respectées. A une date moyenne, l’A.M.C.I fait le transfert des bourses pour chaque ville au service de scolarité de l’université ou de la faculté. Et c’est au service de scolarité de s’occuper de la paie ; nous la percevons au guichet.
J’ai cherché à mener des activités en dehors des cours pour me faire un peu d’argent, malheureusement, à ce jour, toutes mes initiatives se sont soldées par des échecs. Néanmoins j’ai des amis avec qui nous partageons nos souffrances et tout se passe bien à notre façon. »
La vie à Marrakech et à Casablanca
« Marrakech est une ville relativement petite par rapport à Casablanca. On peut dénombrer 250 à 300 étudiants étrangers mais on se connaît presque tous, ne serait-ce que de vue. Lorsque on se croise dans les rues, on se salue. Même s’il s’agit d’une première rencontre. Au sein de la communauté burkinabè, il existe une vie associative très active. Instauré en 1999, le bizutage comme activité d’intégration des nouveaux étudiants a considérablement renforcé les liens entre les étudiants.
En revanche, Casablanca est une ville crainte pour ses nombreuses agressions. Beaucoup de gens (étrangers comme Marocains) connaissent des situations malheureuses. L’année dernière un Camerounais a miraculeusement survécu à l’attaque d’un Marocain qui lui avait asséné trois coups de poignard. Récemment un Ivoirien a été gravement blessé par deux agresseurs qui lui ont soutiré 1200 Dh (120 dollars américains) et un téléphone portable. En avril dernier j’ai été été accosté par trois Marocains non loin de chez moi vers 23 heures. L’un d’eux tenait un couteau. L’un des membres du groupe m’a agressé avec une pierre ce qui a attiré l’attention des gardiens de nuit qui sont venus à mon secours. Il n’y a rien eu de grave. Casablanca, c’est affreux. Bien qu’il existe une réelle solidarité entre étudiants, les associations ne sont pas aussi vivantes qu’à Marrakech. J’ai hâte de finir et de quitter cette ville.
Ici au Maroc les étudiants qui ne vivent pas dans des internats ou dans une cité universitaire vivent de préférence entre compatriotes. Les relations d’amitiés sont en général durables. En revanche, les relations d’amour connaissent une durée de vie très courte. Pourquoi ? Difficile à répondre. Chacun a sans doute ses raisons. Il est très rare qu’un étranger sorte avec une Marocaine. En effet dans la culture islamique marocaine cela n’est pas permis. Par ailleurs, une relation amoureuse est synonyme de relation sexuelle. Inversement, je n’ai jamais vu une étrangère (afrique noire) s’entichée d’un Marocain. Pour en terminer avec ce sujet, je pense que la plupart des étudiants étrangers sont dans une situation de compromis temporaire en attendant de retourner au pays. On en vient à parler d’accord « de Casa ». Pour certains, l’éloignement leur procure une liberté qu’ils gèrent difficilement et sans précaution …
A mon regret, le contact avec les Marocains n’est pas facile, surtout pour ceux qui s’hasardent à parler de religion (Jules est Chrétien), l’amitié sincère est bien rare avec les Marocains. Mais entre « blacks » on s’entre-aide en général » poursuit Jules.
Une vie associative très riche
La vie des étudiants étrangers est également dominée par les activités associatives. Depuis son arrivée au Maroc en 1998, Jules est membre de l’A.E.B.M, l’Association des Etudiants Burkinabè au Maroc. Il y a d’ailleurs assumé plusieurs responsabilités : « Durant l’année universitaire 1999-2000, j’ai été trésorier général de l’A.E.B.M régionale de Marrakech. Au cours de cette année, nous avons inauguré la 1ère édition du tournoi de mini-foot que nous avons appelé « Tournoi de l’Unité ». Mes compatriotes ont perdu la finale au profit des Guinéens de Conakry. En outre, chaque année, lors des fêtes, nous organisons soit un repas familial entre burkinabès, soit une soirée avec les étudiants d’autres nationalités
Au cours de l’exercice 2000-2001, je fus secrétaire général du Comité Régional (CR) de Marrakech. Cette année fut très riche en activités. En plus de nos traditionnelles fêtes et de la 2ème édition du « Tournoi de l’Unité » qui avait pris une ampleur considérable, nous avons lancé l’édition d’un journal d’information que nous avons appelé « L’Etudiant». Le premier numéro fut un succès mais nous avons été confrontés à des problèmes administratifs avec les autorités marocaines locales : il fallait que le journal soit déclaré au tribunal des hautes instances et à la police afin d’être reconnu comme tout autre journal avec un droit de parution. Cela demandait que l’association ait un cachet et des statuts reconnus sur le plan national. Je me suis demené pour lever ces impasses et tout semblait rentrer dans l’ordre. Malheureusement, j’étais déjà au soir de mon mandat et mes sucesseurs n’ont pas jugé utile de poursuivre mes efforts : « L’Etudiant» mourut ! (Oh ! C’est encore avec un gros pincement au coeur que j’y pense).
Au cours de mon mandat j’ai également été membre fondateur de l’institution C.E.S.A.M (Confédération des Etudiants et Elèves Stagiaires Africains au Maroc) de Marrakech. Nous avons organisé, avec beaucoup de succès (et c’est loin d’être prétentieux), une journée culturelle africaine qui a eu lieu le samedi 17 février 2001. Par ailleurs, l’A.E.B.M (ensemble des différents CR) a organisé le 10 mars 2001 une journée culturelle burkinabè à Casablanca. Cette journée a vu la remarquable participation du CR de Marrakech. Nous étions incroyablement motivés et avons fait preuve d’une intelligente organisation. »
En 2001/2002, Jules s’est énormément investi dans les activités de la C.E.S.A.M de Marrakech, « histoire de changer de genre d’activités » dit-il. « Je suis passé d’une association d’étudiants dont les activités étaient centrées autour du sport et de la culture à une association plus tournée vers les problèmes actuels du continent africain : participation à des forums, journées de réflexion, conférences orientées entreprenariat. Malheureusement, lors des élections du bureau les membres ont préféré le jeu des alliances plutôt que la compétence des candidats (chaque nationalité présente son candidat). En dépit de ma popularité, j’ai été battu à la majorité simple et à une voix de différence par un Béninois. Alors, j’ai tout lâché et je suis devenu un simple membre, ce que je suis encore aujourd’hui. »
Stephane
Je suis camerounais me conseillerais vous d’aller continuer mes étude au Maroc?